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Juin 2012 à Moltifao

La dernière fois que j’ai vécu un mois de Juin au village c’était en 1979.

Désormais j’essaierai toujours d’y revenir à cette période :

  • pas de touriste,
  • les odeurs du maquis qu’on ne retrouve pas en été, mêlées à celles du foin fraîchement coupé,
  • les journées très longues
  • le coucher de soleil de la St Jean à la plage d’Ostriconi vide de monde mais pleine de faune et de flore qui réveillent tous nos sens émerveillés,
  • l’accueil exceptionnel réservé à « l’étranger », car la saison touristique n’a pas encore commencé et les gens du coin sont avides de voir du monde après 9 mois de calme,
  • une chaleur estivale presque caniculaire,
  • le torrent limpide et encore vigoureux dont l’eau est plus chaude que la mer.

La température de l’eau de la rivière est exceptionnelle pour un mois de Juin, c’est bien agréable pour le baigneur de passage, mais combiné à la canicule et à l’absence totale de neige en montagne ça présage une grande souffrance pour les animaux et plantes vivant dans le torrent cet été.  A lire : le prochain article sur la guerre de l’eau à Moltifao.

Le Moulin - Juin 2012

Le Moulin, Juin 2012 – Photo de Steeve Calvo

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Quelques nouvelles du pays

Cet été 2011 pour la première fois il est impossible ou presque de se baigner dans l’Asco en aval des gorges, à moins d’aimer particulièrement les staphylocoques et les algues vertes.

La faute au manque d’eau (fonte des neiges survenue trop tôt), au nombre grandissant d’habitations de type chalet ou mobile-home, ou peut-être des campings avec une évacuation des déchets pas toujours aux normes (c’est ce qui se dit, mais ce n’est pas vérifié).

Toujours est-il que c’est bien triste de voir ça. On peut quand-même apprécier la rivière dans les gorges, ça reste magnifique.

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La Saint Martin

février 16, 2011 4 commentaires

Connaissez-vous la St Martin ?  ce jour là en France on fête la victoire de la guerre 14-18 au garde à vous devant les monuments aux morts, tandis que les enfants de Moltifao déambulent sur les chemins du village.

Je n’ai rien vécu de mieux dans ma vie que ces jours de la St Martin à Moltifao. Imaginez un peu …

C’est l’automne en Corse, la saison la plus colorée et il fait encore très chaud là bas en Novembre, jamais vu de pluie ces jours là.

On se retrouve à l’heure de la rosée, les enfants du village les plus jeunes, les plus de douze ans ne sont pas admis, au bout du bout du village, tout en haut du vieux village de Moltifao, chacun avec un grand panier vide.

Et alors notre magnifique journée commence, sous chaque fenêtre de chaque maison on crie « San Martinu, u panu e u vinu », et les gens nous jettent depuis leur fenêtre qui des noix, qui des châtaignes, qui des amandes, qui des bonbons.

On se régale, on rigole et on parle en chemin, de ce qu’on fera plus tard, du temps qu’il fait, de la beauté du monde.

Et enfin la tournée s’arrête vers midi, il est temps car le panier est terriblement lourd, sous la fenêtre du curé, au centre du village près de la place.

Les plus jeunes s’étonnent, pourquoi tous les grands sont-ils là sur la murette de la place ? bizarre.

Les moins jeunes se préparent au combat.

Sous la fenêtre du curé, « Saint Martin, le pin et le vin ».

Et le curé Paoletti nous balance ses pièces de monnaie.

Alors la bataille commence, les grands déboulent en masse pour ramasser les pièces argentées.

Une belle journée qui se termine toujours par des batailles rangées, un bel apprentissage de la vie, et une bonne partie de rigolade.

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Quelques photos du village

février 15, 2011 Laisser un commentaire
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L’éléphant de cœur

février 15, 2011 Laisser un commentaire

Un grand événement du village chaque année c’est la bénédiction des maisons par le curé et sa bande d’enfants de cœur.

C’est un grand jour pour le curé qui reçoit quelques sous, mais aussi pour les enfants qui le suivent, qui eux aussi se partagent la monnaie jetée dans le bénitier par les habitants des maisons visitées.

C’est de bonne guerre, les enfants plus âgés essaient toujours de piquer la place des petits pour suivre le curé, mais le curé n’est pas dupe et ça se finit toujours bien. Bien sûr la place de porteur de bénitier est toujours la plus disputée, et ce jour là avec mon air innocent et mes yeux qui faisaient peur au curé c’est moi qui l’avait gagnée.

Mais le dieu de Moltifao me l’a fait payer.

A la sortie d’une maison qui sentait la confiture de figues, un frelon qui s’ennuyait et voulait goûter au fruit défendu, est venu plonger son dard dans le bénitier.

Craignant surement qu’il n’emporte ma part du magot, j’essayai de le chasser, mais la bestiole pour se venger m’a piqué, à l’oreille.

J’ai fini la tournée des maisons à moitié dans les vapes, mon oreille gonflant à vue de nez. J’étais tellement cuit que j’ai dû quitter tout le monde avant le partage du butin, merde tout ça pour rien.

Le lendemain mes parents m’ont obligé à aller à l’école. Tout le monde m’a appelé l’éléphant de coeur, pendant au moins une semaine.

Depuis, plus jamais je n’ai béni une maison.

L’aube de l’enfant de coeur

On pourrait écrire un roman sur les aventures d’un enfant de cœur à Moltifao dans les années 60-70, j’y reviendrai

Le curé, dieu ait son âme qui ne risque plus de me faire un procès, et le diable sa 4CV, était l’abbé Paoletti, un drôle de petit bonhomme.

Ce Dimanche là, j’allais à la messe comme tous les Dimanche ou presque, c’était obligatoire, non parce que mes parents étaient bigots, mais parce que c’était la norme, impossible d’y échapper, et vu les grosses rigolades que j’ai vécu je ne regrette rien.

Mais ce Dimanche là, j’ai rigolé jaune lorsqu’au détour d’un chemin très loin de l’église le curé m’a choppé  « François et Pierre ne sont pas là, il faut que tu fasses l’enfant de cœur ». Et avec ça, des arguments très persuasifs, menaçant de dénoncer à mes parents mon manque d’assiduité à la messe, impossible d’y échapper.

Donc j’enfile la robe d’enfant de cœur 2mn avant la messe sans trop choisir. Les aubes étaient entassées dans une vieille malle.

Ca commence mal, l’aube est trop petite.

Pas de bol l’aube a une grosse tâche de jaune d’œuf sur son blanc immaculé, mais je m’en aperçois trop tard.

Vraiment pas de bol j’étais en short et en espadrilles (pas prévu d’aller à la messe), avec la robe par-dessus j’ai le look de la mort.

Le total manque de bol, dans l’église il y a C.C. et sa mère.

Ce cauchemar se noie dans mon esprit aujourd’hui, mais je sais que mon entrée sur scène fut ovationnée d’un grand éclat de rire étouffé (les rires dans une église en Corse sont toujours étouffés), et celles qui toussaient le plus étaient C.C. et sa mère. Mon amour pour la fille s’est arrêté net ce jour là.

A la fin de la messe, pour me remercier et pour soulager mon immense désarroi, le curé m’a donné 10 francs, alors je me suis dit « oui les miracles, ça existe », et après j’étais le plus heureux des enfants de coeur de Moltifao.

Quelques années plus tard, entre deux pastis, le curé me confia que mes yeux lui faisaient peur. Du coup j’ai mieux compris pourquoi ce vieux radin m’avait donné dix francs.

P.P. mon ami berger

Quand nous étions tout petits, nous jouions aux soldats, P. lui jouait à la ferme, il avait l’amour des animaux en lui.

P.P. est aujourd’hui berger au village, il a un magnifique troupeau de chèvres.

Je ne donne pas son nom, j’attends qu’il m’autorise à le faire. Sachez juste que P. est un pilier du village et un mec sympa.

Chaque fois que je le revois, malgré les années, brille au fond de son regard cette lueur malicieuse depuis le jour où il a été offrir des fleurs à C.C. dont j’étais éperdument amoureux.

J’étais planqué derrière un mur, trop trouillard pour affronter l’échec d’un rejet, d’ailleurs l’idée d’aller offrir des fleurs n’était pas de moi mais de P., moi je lui ai dit que c’était débile, et j’ai bien essayé de l’en empêcher, quand avec son bouquet de vieilles fleurs de pissenlit à moitié fanées il a abordé C.C. dans le quartier de Mezzana, impossible de l’arrêter. Pour lui c’était simple :

– Quoi tu es amoureux ? mais alors il faut aller lui dire

Bon, le raisonnement tient la route, moi je suivais en cachette ce grand fou de P., surtout pour essayer de décrypter dans le visage de la belle une expression qui m’aurait permis de garder espoir en dépit de cet événement insensé.

Bref P. a offert les fleurs à C. avec une improvisation (c’est une autre spécialité de P.) :

– J’amoure le ciel, JM est amoureux de C.

La conjugaison est poétique, mais les fleurs ont fini dans le caniveau, pas une grosse perte, et les mots de la belle furent si cruels que j’ai préféré les oublier immédiatement.

Incroyable cette capacité de l’esprit humain à oublier ou rectifier les événements douloureux. Ce n’est pas comme les faits insignifiants, car j’imagine que C.C. fût si déçue par le prétendant qu’elle n’a pas gardé trace de cet épisode. Mais je me trompe peut-être.

Tous les gamins étaient amoureux de la belle, sauf P..